Tout au long de nos soifs
8,00 CHF – 16,00 CHF
Description
Les soifs dont parlent ces nouvelles sont celles qui transcendent la monotonie des jours, peuplent la solitude, donnent un sens à ce qui paraît absurde. Elles peuvent être comblées par la plénitude des corps, les liens qui nous unissent à l’autre et à nous-même, la voix de la nature, celle de la musique, qui consolent, exaltent, réchauffent les heures les plus sombres.
Vingt et une nouvelles poétiques, passionnées, gourmandes, fatales, éphémères dans lesquelles l’auteure explore certains aspects inéluc- tables de l’existence, sous le prisme des relations qui constituent une vie humaine.
Seuls les clients connectés ayant acheté ce produit ont la possibilité de laisser un avis.
La maison des fées.
Le front d’Elisa se plissa sous l’effort.
– ... L’étude des com... compartiments... comparaisons... elle s’embrouilla, demeura coite. Son père écrivait depuis des années un énorme ouvrage sur des choses très savantes dont il ne cessait de lui demander le titre. C’était devenu un jeu entre eux. Elle l’estropiait si bien (en y mettant de la malice), qu’elle faisait rire toute la famille. Une astuce pour redonner de l’animation à une conversation languissante. Maman était professeure de piano. On s’enfuyait à l’arrivée des élèves ; rares étaient ceux qu’on écoutait avec plaisir. Mais on s’asseyait volontiers sur le tapis du salon quand c’était elle qui jouait. Elle avait reçu plusieurs prix, avait été assez brillante pour envisager une carrière. On emmenait les enfants au concert à la ville. Elisa admirait la femme en longue robe moirée s’inclinant devant le public et rêvait que maman était à sa place. Julien disait :
– Ça aurait été super de venir t’applaudir.
Leur mère semblait ne rien regretter.
– Je suis trop paresseuse pour songer à une carrière. Les concertistes travaillent plus de six heures par jour. Et savez-vous que je n’aurais plus été que rarement à la maison ? Toujours à l’étranger, entre deux avions, stressée. une vie de fou.
Effectivement, si être célèbre n’était pas plus amusant, maman avait eu raison de ne pas s’obstiner.
Il passait de drôles d’idées dans la tête d’Elisa le soir. La musique montant du salon était le cocon dans lequel elle se pelotonnait avant de s’endormir. Elle était une petite fille tellement heureuse que cela l’effrayait. Dans sa classe, le père de son camarade Lucas était mort dans un accident. La fillette avec laquelle elle s’entendait le mieux, très malade, avait dû partir dans un établissement à l’autre bout du pays. Elisa ne comprenait pas. On allumait peu la télévision chez eux, mais les quelques images qu’elle captait quand son père se croyait seul pour le téléjournal l’horrifiaient, comme les photos des magazines posés sur la table basse. Elle avait questionné les adultes. Pourquoi ? Ce n’est pas juste. Pourquoi eux et pas nous ?
Client Plaisir de Lire –
http://fattorius.blogspot.com/2019/08/claudine-houriet-des-gens-comme-nous.html
Client Plaisir de Lire –
http://www.francisrichard.net/2019/09/tout-au-long-de-nos-soifs-de-claudine-houriet.html