Correspondance

Auteur: BILLE, S. Corinna
ISBN: 9782883870093
Date de parution: 01/01/1995

Correspondance

30,00 CHF

Description

Correspondance inédite de S. Corinna Bille avec ses parents Edmond et Catherine Bille, écrite entre 1923 et 1958.

Extrait de la correspondance de Corinna Bille avec ses parents, où l’on découvre une jeune fille de fort tempérament, qui sait exactement ce qu’elle veut, mais qui sait aussi user de diplomatie et d’humour pour arriver à ses fins:

Corinna Bille à son père

Zurich, 9 mars 1931

Cher papa!

Non! Est-ce possible? Mais qui a donc eu l’idée saugrenue de m’enterrer à Ralligen? Cette école ménagère où vont les sages et raisonnables petites fiancées!
Ah! non merci! Je ne vais pas bientôt me marier, et je n’ai pas non plus l’intention de rester au Paradou. Alors à quoi me serviraient mes connaissances culinaires? A rien du tout. Et puis je suis trop jeune, j’aurais tout oublié jusqu’au jour de mon mariage, si jamais il arrive, ce qui est fort peu probable.
Et puis quelle horreur: être de nouveau la pensionnaire qui ne peut faire un pas sans se buter à des interdictions. Vivre de nouveau au milieu d’un troupeau de jeunes filles souvent bécasses, ah! non! Et vous ne savez pas l’air godiche que ça a d’aller à Ralligen. Une de mes camarades d’école doit aussi s’y rendre, on l’a, toutes, bien plainte.
Cher papa, je suis déçue que tu veuilles faire de ta Fif une femme à popote! Ai-je vraiment l’air de glisser vers la « bohème » ou le basbleuisme? Eh bien je préfère le devenir que d’être « la jeune fille accomplie et rêvée », elle m’est odieuse celle-là, je la déteste.
Et puis, j’aurais beau savoir faire la cuisine, je ne serai jamais l’aimable, la réservée, la polie « jeune fille de la maison » qui sait servir le thé sans tout renverser, causer sans dire des gaffes, et sourire en tendant un biscuit aux invités. Non, je me sens incapable de réaliser ce chef-d’oeuvre!
Il est impossible d’être « petite bourgeoise » lorsqu’on a pour père un grand artiste et pour mère une montagnarde valaisanne. Et ce serait trop bête de quitter Zurich, maintenant que je suis installée dans une superbe chambre, et dans un milieu ne parlant pas français. Depuis quelques jours, j’ai l’impression de faire, tout à coup, de grands progrès à l’allemand, je suis enfin lancée: je lis des bouquins, notamment un, hier, pour lequel je ne me suis presque pas servie du dictionnaire. Non, ce serait vraiment trop dommage de partir d’ici au moment où j’en profite le plus. Le peu d’allemand que je sais serait vite oublié.
Voici mon programme: mai, juin, à Zurich. Juillet, août à Rotzberg où je puis te servir de secrétaire. Septembre au Paradou. Après… je voudrais gagner ma vie puisque tu ne veux pas que je continue l’étude des langues. Voilà mon rêve le plus cher: être dans une librairie si possible française. Je serais dans mon élément et j’ai l’impression d’être faite pour ce métier puisque je suis assez au courant de la littérature ancienne et moderne.
Qu’en penses-tu, mon cher papa? J’espère que tu ne m’en voudras pas trop de massacrer ainsi tes propositions inspirées un peu, il me semble par la muse Julie. N’est-ce pas vrai?
Et oui, tu as raison, Ralligen est bien trop chic, et trop bien pour un panier percé comme moi. Et je ne pourrais plus vous écrire de longues lettres comme je le fais ici. Les seuls sujets épistolaires seront: aujourd’hui nous avons cuit des pommes de terre à la reine et nous avons fait un dessert nommé couronne d’empereur au moka, au rhum et à l’ananas etc. etc… Fraülein Revêche m’a grondée parce que j’ai égaré une de mes deux paires de pattes à poêles. Ma compagne de chambre, Cunégonde de Labourgeoise, a reçu une lettre de son fiancé, qui avive le « feu sacré » qui lui donne tant d’enthousiasme pour la cuisine, etc… etc…
C’est passionnant n’est-ce pas.
J’ai oublié de vous dire que si mamita a envie de venir quelques jours à Zurich, mon lit est à sa disposition. Quand vous serez à Rotzberg, vous pourrez souvent venir ici et je vous ferai les honneurs de ma chambre et de ma ville. Ce sera épatant!
Merci quand même puisque tous ces projets sont faits pour « mon bien ».
Au revoir, mon cher papa, je t’embrasse de tout mon coeur ainsi que mamita.

Fifon

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